Inaccessible, inefficace, illisible, injuste ...

Rédigé le 28/02/2018
Gregory Vernon


“Inaccessible, Inefficace, Illisible, Injuste” sont les premiers mots de la consultation citoyenne organisées par la république en marche sur la Formation professionnelle et Apprentissage. 

23 500 personnes ont répondues à la consultation citoyenne sur la formation professionnelle de la république en marche lancée début janvier 2018 sur Internet. Retour sur les conclusions de cette consultation.

“déconnectée des réalités professionnelles”, “inaccessible”, parfois de “mauvaise qualité”

« La formation professionnelle représente un budget annuel de plus de 25 milliards d’euros, dont 10 milliards de financements publics, mais le résultat n’est pas à la hauteur : “déconnectée des réalités professionnelles”, “inaccessible”, parfois de “mauvaise qualité”.
Alors que nous voulons en faire le principal instrument de la lutte contre le chômage et la meilleure garantie pour sécuriser les transitions professionnelles, nous ne pouvons pas accepter que si peu de citoyens connaissent leurs droits à en bénéficier et les exercent.

Les grands constats :

Un système jugé inefficace

Plus des trois quarts (78%) des personnes ayant répondu à la consultation estiment que notre système de formation professionnelle fonctionne mal. Les défis identifiés sont nombreux : le système est jugé illisible et opaque, proposant souvent des formations inadaptées aux besoins des salariés et demandeurs d’emploi face au marché du travail, voire même inutiles.

Un système jugé illisible

60% des personnes interrogées et concernées déclarent ne pas avoir le sentiment de connaître leurs droits à la formation. Il semble que les efforts de simplification par le compte personnel de formation (CPF) et son accès par internet n’aient pas permis de démocratiser l’information sur les droits à la formation. La majorité des personnes déclarant connaître leurs droits ont été informées par des sources tierces (l’employeur, les syndicats ou des sources personnelles).

Un système jugé injuste

Des inégalités marquées pour accéder à une formation – L’accès à une formation n’est pas le même pour tous :

  • Les salariés travaillant au sein d’une grande entreprise ont deux fois plus de chance d’accéder à une formation que les salariés travaillant au sein d’une petite entreprise ;
  • Environ deux tiers des cadres bénéficient d’une formation chaque année, contre 43% pour les employés et 36% pour les ouvriers ;
  • Les hommes ont davantage accès à la formation que les femmes (40% des femmes contre 46,5% des hommes). Le constat d’injustice est partagé par de nombreuses personnes ayant répondu à la consultation. Elles soulignent un accès inégal à la formation continue.

5 pistes concrètes des citoyens

1. Permettre à chacun de s’inscrire soi-même à la formation de son choix 

Actuellement, les formations sont prescrites au travailleur par l’employeur ou par un organisme tel que Pôle Emploi. Cette présence d’un intermédiaire est vue comme un frein majeur à l’efficacité du système de formation. Permettre une inscription directe à une formation renforcerait l’autonomie des individus dans leurs choix.

Le gouvernement a évoqué une application numérique qui pourrait servir d’outil de souscription. Toutefois la numérisation du recours à la formation professionnelle devrait s’accompagner de dispositifs pour les personnes éloignées du numérique, qui sont potentiellement aussi celles qui ont le plus besoin de formation. 

2. Améliorer l'information sur les formations professionnelles

Pour donner plus d’autonomie aux Français lors de la souscription à une formation professionnelle, il est nécessaire de renforcer l’information disponible sur ces formations.
En effet, le manque de visibilité sur le contenu, la qualité et les débouchés des formations professionnelles ressort comme la lacune majeure de notre système. De même, l’opacité du système de formation alimente une faible concurrence entre les acteurs, ce qui peut nuire à la qualité des formations.
Une piste serait d’avoir un système permettant aux utilisateurs de poster des avis et des retours d’expériences sur les formations dispensées. 

3. Renforcer les droits à la formation des personnes peu diplômées

Afin de renforcer les droits à la formation de ceux qui en ont le plus besoin, les personnes les moins diplômées pourraient bénéficier de droits supplémentaires. Cette logique existe déjà aujourd’hui pour les personnes très peu diplômées – celles ayant un niveau inférieur au niveau CAP, BEP ou brevet. Elles reçoivent deux fois plus d’heures sur leur CPF et bénéficient d’une plafond de 400 heures, contre 150 en règle générale.

Cette logique pourrait être poursuivie pour un public plus large, ce qui reviendrait à instaurer la dégressivité des droits en fonction de chaque niveau de diplôme et non plus seulement à partir du niveau CAP, BEP et brevet.

4. Étudier la possibilité de donner une part de son droit à la formation à un tiers

Pouvoir transmettre une part de leurs droits à la formation à des personnes qui en auraient davantage besoin…. Quand une personne possède des droits qu’ils n’a pas l’intention d’utiliser il devrait pouvoir les transmettre à une personne qui n’arrivent pas à faire financer une formation dont ils auraient besoin.

Pour s’assurer que chacun se forme et conserve des droits, la possibilité de transmettre des heures devrait être encadrée et ne pourraient faire l’objet d’une transaction financière. En outre, un certain seuil incompressible de droits pourrait être instauré.

5. Valoriser les droits à la formation en points et non en heures

Il pourrait être envisagé de valoriser les droits à la formation en points et non plus en heures. Le système horaire actuellement en vigueur produit des inégalités :

  • Les heures disponibles sur les comptes CPF ne sont pas valorisées de la même façon selon les métiers : Deux salariés disposant d’un même nombre d’heures et souhaitant effectuer la même formation mais rattachés à deux branches différentes ne seront pas pris en charge de la même façon.
  • Les formations des personnes les moins qualifiées ont souvent un coût horaire plus faible que celles des plus qualifiées. Par conséquent, une valorisation en euros plutôt qu’en temps permettra une hausse relative des droits pour les moins qualifiés.
  • Le principe en vigueur ne favorise pas l’autonomie des salariés puisque les tarifs de prise en charge horaire sont plafonnés par les OPCA (40 euros en moyenne).

Le temps n’est pas nécessairement l’échelle de valorisation des usagers, en particulier dans certaines entreprises où la durée d’absence peut être un frein à la prise de formation ou pour certaines formations en ligne (type MOOC), dont le développement pourrait être encouragé.

 

Notre analyse :  Il n'y a pas de doute, la formation professionnelle continue que nous connaissons pas ne permet pas ou plus à chacun de mettre ses connaissances à jour, de monter en compétences, de s'adapter aux mutations tant socio-economiques que technologiques du monde du travail ni d'en acquérir de nouvelles. Alors que l'objectif est d'accroître son niveau de qualification, de favoriser son évolution de carrière voir sa reconversion que cela soit pour changer de métier ou retrouver un emploi. Ce qui fait echo avec nos précédents post sur la possible sclérose lorsqu'on délaisse sa formation continue.

Les pistes sont intéressantes et chacun doit prendre sa part de responsabilité à tous les niveaux de la chaine. Notre organisation planche activement sur le dossier. Nous y reviendrons.

Le lien vers le rapport complet est ici : https://storage.googleapis.com/en-marche-fr/COMMUNICATION/LaREM-dossier-FORMPRO.pdf